Pendant plusieurs décennies, la Chine a constitué un passage obligé pour les multinationales et les investisseurs internationaux. Son appareil industriel, son poids démographique et l’ampleur de son marché intérieur ont façonné les grandes stratégies de croissance à l’échelle mondiale. Mais à l’approche de 2026, cette centralité n’apparaît plus aussi incontestable. Une nouvelle hiérarchie est en train d’émerger, au bénéfice de l’Inde.
Selon l’étude Vision 2026 du cabinet Teneo, l’Inde s’impose désormais comme la destination stratégique de référence à long terme pour les dirigeants d’entreprise, au point de devancer progressivement la Chine dans leurs projections. Ce glissement ne traduit pas un désengagement massif vis-à-vis de Pékin, mais plutôt un ajustement des anticipations face aux transformations de l’économie mondiale.
D’une rivalité régionale à un choix stratégique global
La compétition économique entre l’Inde et la Chine s’inscrit dans une histoire longue. Les deux géants asiatiques partagent des espaces de coopération, notamment au sein des BRICS ou de l’Organisation de coopération de Shanghai, tout en poursuivant des trajectoires nationales distinctes. Ces différences, autrefois cantonnées à l’échelle régionale, pèsent désormais directement sur les décisions des acteurs économiques internationaux.
Alors que la Chine entre dans une phase de ralentissement relatif et de maturité économique, l’Inde apparaît comme un marché encore en pleine construction, porté par une démographie favorable et un potentiel de croissance élevé. Cette asymétrie alimente un déplacement progressif du centre de gravité des investissements vers le sous-continent indien.
Les dirigeants revoient leurs priorités
L’enquête de Teneo confirme que les États-Unis restent, sans surprise, le marché jugé le plus attractif au monde. Mais derrière cette constante, les réponses révèlent une recomposition des préférences concernant les grandes économies émergentes. L’Inde et la Chine continuent toutes deux de susciter l’intérêt, mais leur rôle futur est perçu de manière différente.
Aujourd’hui, environ un tiers des dirigeants interrogés considèrent l’Inde comme un pilier « extrêmement important » de leur stratégie. Cette proportion devrait approcher la moitié dans les dix prochaines années. La Chine, de son côté, progresse plus lentement dans cette catégorie, avec une estimation d’environ quatre dirigeants sur dix à l’horizon similaire. Ce différentiel, encore modéré, marque néanmoins une inflexion durable en faveur de l’Inde.
Cette évolution se produit dans un contexte où les discours sur la fragmentation de l’économie mondiale se multiplient. Pourtant, les flux d’investissements et les opérations de fusions-acquisitions demeurent dynamiques, traduisant moins une démondialisation qu’une redéfinition sélective des priorités géographiques.
Les ressorts de l’attractivité indienne
Plusieurs facteurs expliquent cette montée en puissance. L’Inde bénéficie d’un marché intérieur vaste et en expansion, soutenu par une population jeune et une classe moyenne en croissance. Pour les entreprises, ce double atout représente à la fois un réservoir de consommateurs et un vivier de compétences.
À cela s’ajoute le développement accéléré des infrastructures numériques. Le pays s’est imposé comme un acteur clé des services informatiques, de l’externalisation et des technologies numériques, des secteurs devenus centraux dans la compétitivité globale. Cette spécialisation confère à l’Inde un avantage stratégique dans une économie mondiale de plus en plus fondée sur le savoir et l’innovation.
À l’horizon 2026, l’Inde ne remplace pas la Chine dans les stratégies économiques mondiales, mais elle s’impose désormais comme son principal point de référence alternatif. Un changement de perspective qui pourrait durablement redessiner les équilibres économiques internationaux.
Thom Biakpa
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