La militante iranienne des droits humains et prix Nobel de la paix 2023, Narges Mohammadi, a de nouveau été arrêtée vendredi 12 décembre par les forces de sécurité iraniennes, alors qu’elle bénéficiait d’une liberté provisoire pour raisons médicales. L’information a été confirmée par sa famille, son comité de soutien et son avocate française, Me Chirine Ardakani.
Selon la fondation Narges Mohammadi, l’arrestation s’est produite lors d’une cérémonie commémorative organisée à Mashad en hommage à Khosrow Alikordi, avocat décédé quelques jours plus tôt après avoir défendu des manifestants arrêtés lors du mouvement de protestation de 2022. D’après des témoignages concordants, la militante aurait été interpellée avec une extrême brutalité.
Son frère, Hamid Mohammadi, qui vit à Oslo, affirme qu’elle a été « frappée aux jambes et saisie par les cheveux » par les forces de l’ordre. Il s’inquiète surtout des conséquences de cette arrestation sur son état de santé déjà très dégradé. « Elle a subi plusieurs opérations, souffre de problèmes cardiaques et pulmonaires. La pression physique et psychologique qu’ils exercent sur elle est extrêmement dangereuse », a-t-il déclaré.
Une arrestation lors d’un rassemblement réprimé
Des images diffusées par l’ONG Human Rights Activists News Agency (HRANA) montrent Narges Mohammadi participant à la cérémonie sans porter le voile obligatoire, entourée de nombreux soutiens. Les participants scandaient des slogans hostiles au régime, notamment « Mort au dictateur » et « Nous luttons, nous mourons, nous n’acceptons aucune humiliation ».
Selon Ali Rahmani, fils de la militante, les forces de sécurité ont dispersé le rassemblement à l’aide de gaz lacrymogènes avant de procéder à plusieurs arrestations. « Les agents savaient que certaines personnes présentes, dont ma mère, avaient de graves séquelles de santé. Cela ne les a pas empêchés d’intervenir avec une brutalité extrême », a-t-il confié.
Parmi les personnes arrêtées figure également Sepideh Gholian, autre figure emblématique du mouvement de contestation iranien, selon le mari de Narges Mohammadi, Taghi Rahmani, exilé à Paris.
Condamnation internationale
Le comité Nobel norvégien a rapidement réagi en dénonçant une arrestation « brutale » et en exigeant la libération immédiate et inconditionnelle de la lauréate du prix Nobel de la paix. Dans un communiqué, il souligne le caractère symbolique de cette arrestation, survenue au moment même où le prix Nobel de la paix était remis à l’opposante vénézuélienne Maria Corina Machado.
Depuis son interpellation, la famille de Narges Mohammadi affirme ne plus avoir aucun contact avec elle et ignore son lieu de détention.
Un contexte de tensions sociales croissantes
Cette nouvelle arrestation intervient dans un climat social et économique particulièrement tendu en Iran. La flambée des prix des produits de première nécessité et l’effondrement de la monnaie nationale alimentent un profond mécontentement populaire. Des manifestations de retraités, d’ouvriers et de salariés ont lieu quotidiennement à travers le pays, sans réponse significative des autorités.
Figure centrale de la lutte pour les droits des femmes et les libertés fondamentales en Iran, Narges Mohammadi, 53 ans, a passé une grande partie de sa vie adulte en prison. Malgré les menaces, les condamnations répétées et les atteintes à sa santé, sa famille affirme qu’elle n’a jamais renoncé à son combat. « Depuis l’âge de 20 ans, ma mère lutte contre la République islamique. Et elle continuera », affirme son fils.
Thom Biakpa
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