Des femmes allument des pétards lors des célébrations à la veille de Diwali, la fête hindoue des lumières, à l’auberge d’une école à Chennai / AFP
L’air est lourd, presque irrespirable, ce lundi 20 octobre à New Delhi. La capitale indienne, déjà tristement célèbre pour sa mauvaise qualité de l’air, étouffe sous un taux de pollution plus de seize fois supérieur aux limites fixées par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). Et pourtant, les célébrations de Diwali, marquées notamment par l’usage massif de feux d’artifice et de pétards, n’ont même pas encore commencé.
Chaque année, à l’approche de l’hiver, un mélange toxique de gaz et de particules s’abat sur la mégapole de plus de 30 millions d’habitants. Les températures chutent, les vents se calment, et les émissions issues du trafic, des usines et surtout des brûlis agricoles se retrouvent piégées au ras du sol. Ce cocktail devient explosif avec Diwali, la fête hindoue de la lumière, où les éclats de pétards s’ajoutent au brouillard déjà dense.
Face à cette situation, la Cour suprême indienne a tenté une approche plus nuancée cette année. Après avoir imposé une interdiction totale les années précédentes, elle a autorisé en septembre l’usage limité de « feux d’artifice verts », censés être moins nocifs pour l’environnement. Mais leur disponibilité reste anecdotique. Dimanche encore, veille des festivités, seuls 168 vendeurs à travers la ville avaient reçu l’autorisation officielle d’en vendre.
Dans les marchés populaires, la réalité est toute autre. À Arjun Nagar, un jeune marchand sort son téléphone et montre des photos de pétards : « Ils sont à la maison. On ne peut pas les vendre à cause de la police », dit-il en haussant les épaules. Malgré les restrictions, le commerce parallèle bat son plein.
Pendant ce temps, les niveaux de particules fines PM2.5 – celles qui pénètrent profondément dans les poumons, voire dans le sang – ont déjà atteint 248 microgrammes par mètre cube dans certains quartiers, selon les données de la société suisse IQAir. L’OMS recommande un seuil maximal de 15.
Les autorités locales reconnaissent que la situation va empirer dans les jours à venir. Elles affirment avoir lancé plusieurs initiatives d’urgence, comme garantir un approvisionnement électrique constant pour éviter le recours aux générateurs diesel, ou encore lancer, pour la première fois, une opération d’ensemencement des nuages pour provoquer des pluies artificielles. Des pilotes ont déjà effectué des vols d’essai, selon le ministre de l’Environnement de Delhi, Manjinder Singh Sirsa.
Mais ces efforts suffiront-ils ? Car derrière les chiffres, ce sont des vies qui sont en jeu. La pollution atmosphérique cause chaque année des milliers de décès prématurés dans la capitale. Une étude publiée dans The Lancet en 2020 a révélé que 1,67 million de personnes sont mortes en Inde en 2019 à cause de la pollution de l’air – un chiffre aussi effrayant que le brouillard toxique qui enveloppe la ville.
Thom Biakpa
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